Photographe
Mes yeux ont cherché un oiseau en vol, une cheminée d’usine, un verre d’eau qui tremble sur une table, une draisine à l’arrêt, un chien errant, un poteau de ligne téléphonique, une volute d’encre rouge dans une rivière, un morceau de tissu blanc accroché à un gros écrou, une jeep, un labyrinthe en murs de brique, un isolateur électrique, un portail,…
Mes oreilles ont guetté un battement d’ailes d’oiseau, un téléphone qui sonne, un verre qui vibre sur une table, une porte en métal rouillé qui grince, le silence infini d’une pierre qui tombe dans un puits,…
A Tallinn (Estonie), je suis parti à la recherche des lieux de tournage du film Stalker, d’Andreï Tarkovski. A sa sortie au début des années 80, cet objet cinématographique hors-normes avait provoqué en moi un choc esthétique profond.
35 ans après le tournage, j’ai vite réalisé la difficulté de l’exercice. D’abord par la violente lumière de cet été 2014 sans nuages, qui contrastait avec les atmosphères brumeuses et humides du film. Ensuite, par les transformations du paysage urbain soumis depuis plus de 20 ans au souffle constant du libéralisme. Enfin, et surtout, parce que j’ai compris qu’il était illusoire de chercher les traces matérielles d’une construction fictionnelle.
Ma quête a alors changé de registre. J’ai cherché les images qui entraient en résonance avec mes souvenirs des scènes clefs du film et avec les questions qu’elles posaient.